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L’ailleurs des engagés irlandais : de la promesse à la désillusion
Par Élodie Peyrol-Kleiber
Publication en ligne le 16 novembre 2010
Résumé
The geographical displacement of those who immigrated to America was inevitably informed by the expectations that they had developed either through the information that they had collected from other immigrants, or through the stories of mariners and merchants involved in the Atlantic Trade. Notwithstanding these external sources, these immigrants were also inspired to leave their native countries by their imaginations. The vision of an Elsewhere was often conceived as a place in total opposition to their everyday life experiences, and it was this imagined space that lured those who did not have the financial means to cross the Atlantic to engage in a contract which deprived them of their liberty for a given period. This meaningful sacrifice was motivated by the hope for eventual landownership and independence in a “virgin land.” However, the social, economic and political realities of the Atlantic world frustrated their expectations and, for most of them, their utopia proved to be just what it was: the fruit of their imagination.
Le déplacement géographique d’individus s’accompagne d’espérances basées sur les informations récoltées auprès d’autres immigrants, ou par le biais des marins ou marchands effectuant la traversée de l’Atlantique. Cependant, les candidats à l’immigration sont également poussés à abandonner leur pays d’origine par l’imagination. La vision de l’Ailleurs comme lieu construit sur l’antithèse du quotidien incita ceux qui n’avaient pas les moyens financiers de s’offrir la traversée de l’Atlantique, et qui partirent volontairement, à souscrire un engagement les privant de leur liberté pendant un temps donné. Ce lourd sacrifice était motivé par l’espoir d’accéder à la propriété terrienne ainsi qu’à leur indépendance dans une contrée qu’ils pensaient vierge et où tout serait possible. Cependant, les réalités sociales, économiques et politiques du monde atlantique vinrent contrecarrer ces espérances et, pour la plupart d’entre eux, leur utopie s’avéra être ce qu’elle était : le fruit de leur imagination.
Table des matières
Texte intégral
1Le passé irlandais est parsemé de périodes de migrations durant lesquelles des milliers d’Irlandais quittèrent leur pays natal pour tenter d’atteindre un ailleurs rempli d’espoirs et de rêves. L’engagement était un moyen particulier de migration selon lequel un individu se soumettait à l’autorité d’un maître pendant un nombre défini d’années en échange de son passage vers les colonies anglaises. Ce système était couramment employé au début de la colonisation de ces territoires car les pionniers avaient cruellement besoin de main-d’œuvre, laquelle était indispensable à la survie et au développement des nouveaux espaces. L’immigration apparaissait comme particulièrement attrayante pour les Irlandais qui voyaient leur île colonisée par les Anglais, déclenchant des instabilités à la fois économiques et politiques mais aussi sociales. L’Irlande était, à cette époque, une colonie anglaise et certains historiens considèrent qu’elle joua le rôle de laboratoire d’expérimentation formant les hommes que nous retrouverons plus tard occupant des postes importants dans le Nouveau Monde1. Ainsi, une partie de la population, principalement des Catholiques, fut déplacée vers des terres moins fertiles, comme la région de Connaught dans l’ouest de l’Irlande, ou envoyée dans les colonies. La perte de leurs terres conduisit de nombreux Irlandais à rechercher un meilleur horizon, parfois en Angleterre dans un premier temps, puis vers les colonies anglaises. Le familier, l’ici ayant été envahi et rendu inconnu, l’ailleurs séduisit et attira les Irlandais déracinés.
2Cet article tentera, tout d’abord, de déterminer de quelle manière les engagés irlandais ont construit autour des colonies d’Amérique une société utopique à laquelle ils souhaitaient appartenir, d’une part en s’imaginant un monde en totale contradiction avec celui dans lequel ils vivaient, et d’autre part en se laissant influencer par la propagande visant à peupler ces nouveaux territoires. Il s’agira ensuite d’expliquer l’impact que les réalités de la vie coloniale eurent sur cette vision idéaliste de la Chesapeake et comment elles vinrent contrecarrer ces espérances et se posèrent en limites de cet Eden de manières diverses. Enfin, il conviendra de nuancer les propos précédents, car certains engagés parvinrent à s’approcher de cette promesse d’une vie meilleure, en réalisant des parcours de vie qui certes se révélèrent décevants en comparaison de l’imago mundi positive que les migrants s’étaient inventée, mais qui leur permirent tout de même de s’intégrer à leur nouvel environnement
La promesse d’un ailleurs meilleur
3L’Irlande du XVIIe siècle peut être décrite comme un champ de bataille sur lequel les différents groupes religieux et sociaux s’affrontaient tour à tour. Les « Old English », descendants des Normands qui avaient pris le contrôle des deux-tiers de l’île à la fin du XIIIe siècle et qui étaient largement catholiques, s’étaient peu à peu mêlés à la population native, les « Gaels »ou« Gaelic Irish », qui eux vivaient principalement de manière clanique. Seule la région de Dublin, appelée « the English Pale », demeura sous le joug de la couronne anglaise en 1500, créant ainsi deux groupes bien distincts. Ainsi, au début du XVIe siècle, l’autorité anglaise sur l’Irlande était largement nominale. Suite au schisme d’Henry VIII, la situation se compliqua car les nouveaux arrivants, les « New English », qui comptaient bien faire appliquer la loi anglaise et faire fortune en Irlande, provoquèrent rapidement la colère des « Old English », voyant leurs privilèges menacés, et des « Gaels », dont les traditions, particulièrement concernant l’héritage et la propriété des terres, différaient totalement du système anglais de primogéniture et de location de la terre. Ainsi, le contexte politique irlandais était explosif, et à cela s’ajouta un durcissement de la politique religieuse anglaise sous Edouard VI et Elizabeth I, qui mena à la révolte constante des « Old English » et des « Gaels » contre l’autorité anglaise à la fin du XVIe siècle et au début du suivant. Les conflits se poursuivirent avec, entre autres, la rébellion des Catholiques en 1641, provoquée par le déplacement des populations catholiques de la région d’Ulster, au profit des nouveaux pionniers anglais et écossais qui s’attribuaient les meilleures terres, et qui secoua l’Irlande durant dix ans. En 1649-51, l’armée puritaine d’Oliver Cromwell mit fin à la résistance catholique et amorça la transplantation des Irlandais dans la région de Connaught principalement. Ainsi, en 1658, les Catholiques ne possédaient plus que 20% des terres irlandaises et quelques centaines d’entre eux furent envoyées dans les colonies comme prisonniers. Les conflits, les épidémies de peste et les famines s’étaient abattus sur le pays durant dix ans et les Irlandais avaient perdu leurs terres ancestrales. C’est dans ce contexte que les futurs engagés furent amenés à se construire une vision utopique de l’ailleurs, en opposition avec l’ici. Les bardes du XVIIe siècle développèrent dans leurs ballades les thèmes du malheur des Irlandais et de la malédiction anglaise2, ce qui poussa certains à rêver d’un monde meilleur, où paix et prospérité règneraient. La propagande et les témoignages des premiers pionniers dans les colonies d’Amérique se chargèrent de mettre un nom sur cet ailleurs auquel les futurs engagés aspiraient, et de le leur décrire.
4Certains engagés firent ce voyage en deux temps : nombreux furent ceux qui, par peur d’aller trop loin, ou par désir de retrouver un univers plus familier, tentèrent leur chance en Angleterre. Les quelques listes de contrats d’engagement qui survécurent montrent que les lieux d’origine des engagés couvraient l’Angleterre, l’Écosse, le Pays de Galles et l’Irlande, ainsi que d’autres pays européens tels que la France et le Danemark. Si nous prenons l’exemple des listes de Bristol, qui concernent les années 1654 à 1686 et 10 573 engagés, il apparaît que seuls 288 engagés furent enregistrés comme originaires de Bristol, alors que 44 d’entre eux venaient d’Irlande, comme John Barry de Cork, Thomas Shoyle de Kilkenny, Anthony Dusebury de Londonderry ou encore Hugh Travericke de Waterford, engagés qui furent tous transportés dans les colonies à partir de Bristol3. Au vu de ces listes, ils ne parvinrent pas à réaliser leur rêve de réussite en Angleterre, et finirent par embarquer pour les colonies.
5Afin de les persuader de traverser l’Atlantique, car d’une part le commerce de la main-d’œuvre était lucratif, et d’autre part les terres d’Amérique devaient être occupées et exploitées, de nombreux pamphlets étaient distribués dans les principaux ports anglais et irlandais dans le but de présenter les colonies continentales comme un nouvel Eden où tout était possible, un espace vaste et vierge qui laissait libre cours à l’imagination. Une source y fait référence pour le Maryland, il s’agit d’une lettre écrite par le gouverneur Seymour en août 1706 et adressée au « Council of Trade and Plantations », lettre dans laquelle le dit gouverneur explique l’arrivée d’un nombre important d’engagés irlandais catholiques, en précisant qu’ils étaient encouragés à s’installer au Maryland :
Upon a specious though false encouragement given them in Ireland by Mr Charles Carroll or his agents, who in that H.M. kingdom, printed and dispersed papers assuring them of good tracts of land at the head of the Bay, and free toleration and exercise of their superstitious worship4.
6Peu de ces documents ont survécu, mais nous pouvons citer George Alsop,dans A Character of the Province of Mary-Land, qui raconte sa propre expérience en tant qu’engagé au Maryland. Lorsqu’il présente cette colonie, il utilise des termes tels que « extraordinary pleasant and fertile », « green, spreading and delightful Woods », «she [Maryland] doth otherwise generously fructifie this piece of Earth with almost all sorts of Vegetables, as well Flowers5 ». D’autres pamphlets étaient plus spécifiquement destinés aux futurs engagés et s’attachaient à mettre en lumière les avantages de ce système, en niant les nombreuses rumeurs d’un travail rude et de conditions de vie déplorables. Leah and Rachel de John Hammond en est un exemple. Dans ses écrits, il dépeint des conditions de travail très favorables pour les engagés dans les deux colonies :
The labour servants are put to, is not so hard nor of such continuance as Husbandsmen, nor Handicraftmen are kept at in England, I said little or nothing is done in winter time, none ever work before sun rising nor after sun set, in the summer they rest, sleep or exercise themselves give hours in the heat of the day, Saturdays afternoon is always their own, the old Holidays are observed and the Sabbath spent in good exercises. […] Those servants that will be industrious may in their time of service gain a competent estate before their freedoms, and they gain esteem and assistance that appear so industrious: there is no master almost but will allow his servant a parcel of clear ground to cut some tobacco in for himself6.
7Il laissait ainsi entrevoir aux engagés une vie aisée, un ailleurs rassurant et surtout totalement différent de ce que les Irlandais avaient pu vivre dans leur pays natal. C’était donc avec des informations telles que celles-ci que les engagés embarquaient pour le nouveau monde.
8La seconde forme que revêtait ce réseau d’information est plus obscure mais néanmoins bien réelle. En effet, des rumeurs circulaient sur les destinations à privilégier ou au contraire à éviter, et qui pouvaient parfois surprendre les marchands venus en quête d’engagés. Thomas Anthony fut dépêché en avril 1636 à Kinsale par Mathew Cradock, en tant que subrécargue, ayant pour mission de recruter des engagés en attendant l’arrivée de l’Abraham, bateau sur lequel ils seraient embarqués7. À son arrivée, Thomas Anthony se rendit compte que les engagés ne voulaient pas partir pour la Virginie mais pour Saint Christophe : « an impression had got about that servants in that colony were given liberal wages by the year, and in view of this no one wanted to go to Virginia8 ». Aucune preuve de cela n’a pu être trouvée, mais il n’en demeure pas moins que Mathew Cradock autorisa son subrécargue à s’arrêter sur l’île pour vendre les engagés. Cet exemple nous permet de réfuter l’idée souvent répandue des engagés partant vers l’inconnu. Ces derniers étaient, en effet, beaucoup plus au fait de ce qui se passait dans les diverses colonies que ce que veulent bien penser certains observateurs contemporains ou historiens s’étant penchés sur la question. Par le biais de courriers personnels, par le bouche-à-oreille et via les bateaux, les engagés étaient à même de décider quelle serait la destination la plus intéressante. Mathew Cradock se laissa donc influencer par les velléités des futurs engagés en autorisant le capitaine Anthony à faire escale à Saint Christophe, soulignant ainsi que les engagés non seulement n’étaient pas victimes du phénomène, mais qu’ils disposaient d’un certain pouvoir de décision et de négociation de leur contrat.
Un ailleurs souvent sinistre et meurtrier
9Les Irlandais souhaitant échapper à leur vie se voyaient offrir l’opportunité de découvrir cet ailleurs qu’ils s’étaient imaginé avec l’aide des tracts, des récits de marins et de marchands. Cependant, ce voyage avait un prix, et il devait leur en coûter leur liberté. La notion de purgatoire est proéminente dans la religion catholique, et d’aucun se représentèrent le contrat d’engagement comme une épreuve qui leur permettrait d’accéder à leur rêve de propriété terrienne et d’indépendance, à une seconde chance de réussir leur vie. La durée du contrat d’engagement variait selon divers critères, mais David Galenson estime sa durée moyenne à 4 ans, en se basant sur les listes de contrat de Bristol, de Middlesex et de Londres, couvrant la deuxième moitié du XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle9. Cependant, il établit que les engagés non qualifiés servirent durant une plus longue période. Robert Smith de Kinsale, identifié comme charpentier, signa un contrat de 4 ans en 1655 alors que, la même année, George Diton de Cork, sans qualification particulière, s’engagea pour 6 ans, les deux ayant pour destination la Virginie.
10La notion de voyage, de déplacement, est ici très importante, car l’Océan Atlantique a souvent été décrit comme une barrière, un gouffre empêchant le vieux et le nouveau monde d’être liés. Dans l’imaginaire des futurs engagés, l’Océan devint une route vers un territoire vierge où tout était possible. Cependant, nombreux étaient ceux qui n’avaient pas été effleurés par l’idée que l’ailleurs puisse revêtir la forme de la mort. Cependant, ce néant était bien présent puisque environ un quart des engagés mourait durant leur temps de service. La mort, qui les avait traqués jusque dans les « coffin ships », ne comptait pas les abandonner si rapidement et parvenait à faucher une grande majorité de ces engagés une fois arrivés sur la Terre Promise.
11Tout d’abord, il fallait que l’engagé survive aux maladies, au changement de climat, ainsi qu’aux attaques des Amérindiens. Les maladies étaient en effet nombreuses, et comme le disait le gouverneur Berkeley, elles étaient une des raisons principales du fort taux de mortalité. Il apparaît, d’après les registres de l’époque, qu’un engagé acclimaté, c’est-à-dire ayant survécu à sa première année dans les colonies, avait une plus grande valeur pour les colons qu’un « nouvel engagé ». Il fallait donc que le nouveau venu surmonte les obstacles naturels de son nouvel environnement. C’est lors de la traversée que la réalité rattrapa nombre d’engagés, que la vision utopique de la Chesapeake se mua en dystopie, ou « place mauvaise », et que l’ailleurs vierge et idéalisé se transforma en Ici hostile.
12Mais avant d’arriver dans les colonies, le voyage à travers l’Atlantique était en lui-même une épreuve car les conditions à bord étaient souvent bien précaires. Le capitaine du navire s’engageait à fournir des vêtements et de la nourriture durant la traversée qui pouvait prendre jusqu’à deux mois. Si l’on reprend l’exemple de James Revel, le passage dura plus de sept semaines. James Revel raconte que sur 60 engagés 5 moururent durant la traversée, soit 8%10, ce qui ne paraît pas considérable si l’on énumère les nombreuses maladies qui pouvaient se développer à bord, comme le fait Gottlieb Mittleberger en 1750. Il évoque : « terrible misery, stench, fumes, horror, vomiting, many kinds of sea-sickness, fever, dysentry, headache, heat, constipation, boils, scurvy, cancer, mouth-rot and the like11 ». Le taux de mortalité était en effet très élevé lors de la traversée, à la fois pour les passagers et le bétail12.
13Une fois arrivés à destination, les engagés qui avaient survécu au voyage étaient « remis en état » autant que faire se pouvait et vendus aux planteurs sur une place, un peu à la manière des esclaves. Ce moment était décrit comme une fête où tous les planteurs de la région se rassemblaient. Prenons à nouveau le point de vue de James Revel :
Then to refresh us we were all made clean,
That to our buyers we might better seem,
The things were given that did to each belong,
And they that had clean linen put it on,
Our faces shav'd, comb'd out wigs and hair,
That we in decent order might appear,
Against the planters did come us to view,
How well they lik'd this fresh transported crew.13
14A leur arrivée dans les colonies, les migrants devaient s’habituer au climat et résister aux maladies. La mort d’un engagé pendant l’accomplissement de son contrat était chose courante, comme le gouverneur Berkeley de Virginie l’exprima en 1671, en disant que les années précédentes, 4 engagés sur 5 étaient morts de maladie peu de temps après leur arrivée.
15Les historiens considèrent que le « seasoning » donnait lieu à une forte mortalité au sein des engagés.14
16Une fois acclimatés, ils devaient parfois affronter une vie très difficile, avec de nombreuses heures de travail et des maîtres qui les maltraitaient. Il pouvait s’agir de maîtres qui corrigeaient leurs engagés de manière un peu trop continue, et il arrivait que certains meurent suite à des blessures infligées par leur maître.
17Certains engagés se rebellaient contre leur maître ou leur régisseur dans les plantations, comme Hugh et Daniel, deux engagés irlandais du comté de Northumberland, en Virginie, qui attaquèrent la personne qui supervisait leur travail. La notion de rébellion était présente à tous les niveaux de la vie coloniale et constituait un thème récurrent, symbolisant le déni d’une situation où l’engagé, comme l’esclave, n’était pas maître de sa vie. La rébellion était le moyen le plus courant de refuser d’être destitué de son libre-arbitre, de tenter de regagner cette vie illusoire qui avait conduit ces individus à quitter leur pays. Bien souvent cependant, cette démonstration de force ne résolvait en rien la situation, et parfois la faisait même empirer. Cette vie dénotait tellement de celle qu’ils avaient imaginée que le suicide semblait être une issue plus acceptable. Le corps de Thomas, un engagé irlandais, fut retrouvé en 1656 en Virginie. Suite à son autopsie, le jury déclara qu’il s’était suicidé : «Thomas had willfully made himself away, first by cutting his throat with a drawing knife and afterwards by drowning himself in a well where he finished his last breath15 ». Était-ce réellement un suicide ? Ou le crime d’un congénère a-t-il été dissimulé ? Nous ne le saurons jamais, mais nous sommes cependant bien loin de la vision de l’engagement de John Hammond.
18Aux obstacles qui se présentaient à la grande majorité des engagés dans ces colonies s’ajouta le problème de la religion pour les Irlandais. L’ailleurs vierge, où tout pouvait être réécrit était en fait déjà teinté des stéréotypes et croyances propres aux colonisateurs. Les Irlandais étant associés dans l’esprit des Anglais au catholicisme (on retrouve d’ailleurs dans certaines sources des formulations telles que « the Irish, who are generally papists »16), ils furent victimes de préjugés, et souffrirent d’un traitement spécial orchestré par les sociétés coloniales mais aussi par la loi.
19Par exemple, il était fréquent que les engagés arrivent en Virginie ou au Maryland sans contrat. Les autorités coloniales durent rapidement faire face à ce problème et décidèrent de fixer un nombre d’années de service en rapport avec l’âge de l’engagé. La première loi concernant la durée de contrat des engagés au Maryland fut établie en 1639, puis modifiée en 1654, 1661 et 1671, afin de l’adapter aux besoins des planteurs. En ce qui concerne la Virginie, la première loi fut promulguée en 1643, puis modifiée en 1658, 1661, 1662 et enfin 1666 pour les mêmes raisons. Ces lois fixaient à 5 ans le temps d’engagement si la personne avait plus de 22 ans, à 6 ans si elle avait entre 18 et 22 ans, à 7 ans entre 15 et 18 ans, et si l’engagé avait moins de 15 ans, il devait servir jusqu’à ses 22 ans17. Ces lois étaient applicables à tous les engagés arrivant dans ces colonies sans contrat.
20Cependant, les autorités coloniales mirent en place des lois concernant spécifiquement les engagés irlandais et visant à limiter leur arrivée dans le Nouveau Monde. Ces décisions furent déclenchées par plusieurs incidents aux Antilles durant les années 1650, à l’occasion desquels des engagés irlandais et des esclaves s’unirent pour se rebeller contre les autorités anglaises. De la même manière que les rumeurs informaient les futurs engagés de la situation dans les colonies, les événements se déroulant aux Antilles atteignirent rapidement les colonies de Virginie et du Maryland. Par conséquent, le temps de service des engagés irlandais fut rallongé en Virginie, une taxe fut mise en place au Maryland, et des rumeurs ainsi qu’une certaine paranoïa naquirent au sein de ces deux sociétés coloniales. Le gouvernement de Virginie réagit promptement car, dès 1655, il mit en place une loi visant à rallonger le temps de service des engagés irlandais :
all Irish servants that from the 1st of September 1653 have bin brought into this collony without indenture shall serve as followeth : all above 16 years old to serve 6 years, and all under to serve till they be 24 years old18.
21Le temps de service était plus long que les dispositions prises pour tous les autres engagés, et ce afin de ralentir l’arrivée des engagés irlandais, considérés comme un possible danger. En 1659, par exemple, Walter Hind arriva sans contrat à Charles City (Va) et fut assigné à servir 6 ans « following the act for Irish servants. » En ce qui concerne la Virginie, cette loi fut modifiée en 1658 pour inclure « all aliens ». Elle fut finalement abrogée en 1660 car elle décourageait les engagés à s’installer dans la Chesapeake et ralentissait donc la progression économique de ces colonies.
22Ainsi, être irlandais et catholique ne constituait pas un atout pour parvenir à cet ailleurs tant espéré. Les colons protestants avaient peur que les Irlandais catholiques ne polluent ces nouveaux espaces de leurs croyances barbares. En effet, le catholicisme pratiqué en Irlande faisait peur, car il était considéré dans l’Angleterre des XVIe et XVIIe siècles comme une religion faite de superstitions et d’idolâtries n’ayant que peu de choses en commun avec le catholicisme pratiqué avant le mariage d’Henry VIII avec Catherine d’Aragon. Dès le XIIe siècle, les Irlandais étaient représentés comme des barbares cannibales et assoiffés de sang, dont les coutumes différaient tellement de celles connues en Angleterre qu’ils inspiraient la terreur19. Suite au schisme d’Henry VIII, ce n’était plus du catholicisme des Irlandais dont il était question, mais du catholicisme en général. Mis à part le règne de Mary Tudor durant lequel l’Angleterre et le Pape se réconcilièrent, les XVIe et XVIIe siècles virent se renforcer la conviction protestante selon laquelle les Irlandais étaient les alliés de l’Antéchrist papal et les ennemis incorrigibles de la loi anglaise20. En effet, cette obédience au chef de l’Église romaine mettait en doute la capacité des Catholiques à obéir aux lois anglaises, ainsi que leur loyauté envers le roi d’Angleterre. Comment pouvaient-ils être respectueux des lois anglaises s’ils obéissaient au pape ? Les Catholiques représentaient donc un danger pour la monarchie et l’ordre social. La haine de cette religion et de ses partisans eut pour effet de rapprocher entre eux les Protestants anglais qui devaient se défendre face à cet ennemi. De plus, le catholicisme était fortement associé à la France, puissance qui faisait peur et dont le roi était considéré comme un agent de l’Antéchrist, ayant pour seul but d’anéantir les Protestants. En effet, la peur d’un complot catholique avec les Français, par exemple, était présente dès le milieu du siècle et resta vivace à la suite des événements de 1667 sur l’île de Montserrat :
These are to certifie: that some time in March last my self being upon Spesutis [Spesutia] Island with Henry Johnson seeke ing for Deare or Turkeys, that the said Johnson did enquire of me if I did heare of the Irish that was to come into this Province, which I did reply that I did not heare of any, then the said Henry Johnson replyed there is ffourty ffamilys to come in under the pretence of seateing Susquehannah River, but that ffourty ffamilys will proove in the End to be ffourty thou sand to cutt the Protestants throats21.
23Les Catholiques étaient diabolisés et décrits comme des êtres assoiffés de sang, ne cherchant qu’à brûler les villages et massacrer femmes et enfants. Ils étaient ainsi déshumanisés pour mieux justifier leur persécution et la haine qu’ils subissaient de la part des Anglais. Bien entendu, ces préjugés et idéologies fleurirent dans les colonies, où les dangers étaient multiples, et les Catholiques anglais et irlandais furent rapidement associés à d’autres peuples indignes de confiance, et en particulier aux Amérindiens. C’est donc dans un contexte hostile que les engagés irlandais arrivaient en Virginie et au Maryland.
24Cependant, une fois son contrat terminé, l’engagé pouvait envisager son futur en tant qu’homme libre, et tenter de réaliser son rêve de vie meilleure, mais surtout accéder au statut de propriétaire de terres.
La quête souvent vaine de la propriété terrienne
25Suite aux divers efforts de colonisation de l’Irlande par l’Angleterre, la population catholique avait perdu ses terres ancestrales appartenant aux clans depuis de nombreuses générations. Ainsi, sur l’île, la plupart des Irlandais étaient déjà déracinés, et vivaient en étrangers dans leur propre pays. En effet, seuls les propriétaires catholiques avaient été dépossédés de leurs terres, mais les serfs natifs considéraient leur seigneur comme un chef de clan, et la plupart le suivirent sans se poser de question dans les contrées hostiles de Connaught. Ainsi, même les Catholiques les plus riches se voyaient refuser l’accès à la source de profits la plus sûre dans une société majoritairement basée sur le travail de la terre. Il était donc quasiment impossible pour un Irlandais catholique d’être propriétaire terrien. L’opportunité de se voir attribuer 50 arpents de terre une fois leur contrat effectué était une motivation primordiale qui poussa de nombreux engagés irlandais à partir. Ainsi, les nouveaux hommes libres pourraient s’installer sur leurs terres et, à l’aide de leur « freedom dues », construire leur ferme ou leur plantation, amorcer leurs cultures et, pour ceux qui en avaient les moyens, engager de la main-d’œuvre qui leur permettrait de prospérer et de développer leur affaire.
26Une autre manière d’acquérir des terres était de se marier afin d’hériter des terrains possédés par la famille de l’épouse. Ainsi, James French devint propriétaire de 129 arpents à la mort de son beau-père, et John Mulls hérita de 340 arpents de terre lorsqu’un patient de sa femme, qui exerçait la profession d’infirmière, décéda.
27En se mariant, James French acquit donc 129 arpents et 21 de plus à la mort de son beau-père. Enfin, un ami irlandais, John Baptista Carberry lui légua 100 arpents de plus quelques années plus tard. Les exemples de Rowland Williams et John Mulls, du comté de Northampton en Virginie, nous permettent d’établir sensiblement les mêmes schémas que pour James French au Maryland. Ces deux engagés irlandais apparaissaient dans les sources comme des propriétaires terriens, planteurs, le premier célibataire, l’autre marié avec des enfants, mais tous deux faisaient partie d’un réseau social en se portant garants pour d’autres colons par exemple. Ces engagés, une fois leur liberté regagnée, parvinrent à se réinventer une vie, à apprivoiser la nouvelle société dans laquelle ils évoluaient avec leurs familles et à se constituer de nouveaux liens dans une communauté toujours changeante. Ils durent également apprendre à construire leur identité, forts de leurs expériences d’engagés et imprégnés de leur passé en Irlande.
28Ces anciens engagés devinrent à leur tour des maîtres, ayant soit des serviteurs sous contrat, soit des esclaves travaillant dans leur plantation, et jouèrent le rôle de ceux qu’ils craignaient tant durant l’accomplissement de leur contrat. Il est difficile de savoir s’ils devinrent des maîtres conciliants et respectueux de leur main-d’œuvre, comme on pourrait s’y attendre. Pour l’île de Montserrat, une étude a prouvé que les anciens engagés irlandais avaient en moyenne plus d’engagés et d’esclaves à leur service une fois libres et propriétaires d’une plantation, et qu’ils traitaient leur main-d’œuvre plus durement que les hommes libres de l’île car ils savaient comment diriger leur affaire afin qu’elle prospère et que les hommes sous leurs ordres soient productifs.
29La vision des colonies comme terres de promesses pour tous les immigrants a persisté jusqu’au XIXe siècle où l’on racontait les « success stories » de certains engagés. Cependant, la réussite ne fut possible que pour un petit nombre d’entre eux, même au milieu du XVIIe siècle où les conditions sociales et économiques étaient favorables. Cependant, tous ne devinrent pas propriétaires et de nouvelles formes d’engagement virent le jour à la fin du XVIIe siècle. En effet, de nombreux engagés découvrirent à leurs dépends que les 50 arpents promis devaient être réclamés, et que s’en suivaient des démarches longues et coûteuses de frais d’administration et d’expertise. Ainsi, seuls 7% des engagés qui parvinrent à la fin de leur contrat s’installèrent sur leur lopin de terre22. Une fois le terrain acquis, il devait être défriché et le propriétaire devait construire son habitation. Afin de préparer la première récolte ainsi que la subsistance du propriétaire et sa famille, ce dernier devait avoir des outils, des graines à semer, du bétail, et réussir à se procurer des provisions en attendant les fruits de sa première récolte. Ces obstacles s’érigeaient devant tous, et seuls les plus chanceux parvenaient à les surmonter.
30Plusieurs options, bien loin de satisfaire leur rêve d’un ailleurs paradisiaque, s’offraient à ceux qui ne parvenaient pas à s’installer comme planteurs. Certains engagés devenus libres et participant à la vie de la communauté se retrouvaient sans famille ou sans résidence fixe. Au Maryland, nous avons, par exemple, la description de trois Catholiques, dont un Irlandais, qui illustre la pauvreté dans laquelle les hommes libres pouvaient tomber :
Whereupon it is observed that Mr Carbiny [Carburry] is an Irish Roman Catholic and a man of little or no estate supposed to be much indebted that Mr C. Butler is a known papist and is not known of any visible estate that he has heard that Mr Harpam is a person who is generally supposed to carry all his estate about with him23.
31Afin de parer à cette éventualité, on constate dans les sources24 la création d’un statut de résident, ou « freedman inmate », plus visible au Maryland qu’en Virginie. Ce résident faisait partie du foyer sans en être le chef de ménage : il était donc célibataire, ne possédait pas de terres et ne s’acquittait pas de la dîme. Trois formes de travail s’offraient au résident. Il pouvait consentir à travailler un an, en échange d’une rémunération ou d’une partie des bénéfices de la récolte. Il pouvait également louer à bail une partie des terres afin d’en récolter les fruits, ou décider de travailler pour une rémunération journalière. La première forme de travail permettait au résident de faire payer ses impôts par le propriétaire de la plantation ou ferme, tout en bénéficiant du logis et du couvert, voire même d’une rémunération à l’issue de l’année travaillée. La seconde forme de travail apparaît plus rarement dans les sources, mais elle indique que le résident payait un loyer pour l’utilisation des terres du propriétaire. Enfin, la troisième option était d’ordre saisonnier, car la rémunération par jour était importante, et il est peu probable qu’un planteur dépense de telles sommes de manière régulière. Ce système de main-d’œuvre était plus vraisemblablement utilisé pendant les temps forts de la culture du tabac, c’est-à-dire à la fin du printemps lorsque les plants de tabac étaient transplantés, ou lors de la saison de coupe à la fin de l’été.
32En parallèle des résidents, certains engagés devenus libres n’avaient pas d’autre choix que de se réengager, soit auprès de leur ancien maître, soit auprès d’un autre planteur, et ce de manière saisonnière, ou journalière, souvent durant les temps forts de la culture du tabac. Alors que l’industrie du tabac se mit à stagner dans les années 1680, beaucoup tentèrent de se spécialiser, y voyant de meilleures opportunités. Carr et Menard identifient une importante différence de richesse entre les travailleurs qualifiés et les hommes travaillant la terre25. Des activités comme l’élevage de moutons et la culture du blé apparurent ; les cordonniers et tailleurs se multiplièrent de manière significative.
33Enfin, certains voulurent faire le voyage à l’envers, comme James Revel, mais les sources ne font état d’aucun engagé irlandais étant retourné en Irlande après avoir effectué son temps de service dans les colonies. Un jeune irlandais déposa une plainte en Virginie car il disait être maltraité et voulait rentrer chez sa mère en Irlande. Il fut taxé de « childish talk » et renvoyé dans la plantation de son maître26. Nous voyons ainsi une volonté de retourner vers un espace connu, devant la difficulté des conditions de vie dans les colonies. Cependant, les engagés étaient liés à leur maître par leur contrat et ne percevaient aucuns revenus ce qui rendait la tâche difficile voire impossible pour quiconque désirait retraverser l’Atlantique. Peu le firent et la seule alternative qui s’offrait à eux était de migrer à nouveau sur le continent américain.
34Ainsi, les engagés se retrouvèrent dans un espace hostile, un ailleurs que la majorité d’entre eux ne parvint pas à s’approprier. L’ailleurs qu’ils voulaient transformer en ici demeura un espace nomade qu’ils se contentèrent de traverser ou de hanter27. Le purgatoire symbolique que le contrat d’engagement représentait devint un état qu’ils subirent de manière non pas temporaire mais durable. Les engagés aspiraient à être maîtres de leur vie, à ne plus dépendre d’une puissance colonisatrice qui les limitait et les malmenait, mais ils recréèrent cet état contre leur volonté et dans un espace géographique différent, si bien qu’ils firent du surplace et demeurèrent un rouage, certes important, mais secondaire et subordonné, du système économique de la Chesapeake, sans pouvoir intégrer les classes dirigeantes.
35La transplantation, c’est-à-dire le déracinement des engagés irlandais et leur enracinement dans les terres coloniales ne fonctionna pas pour la plupart d’entre eux. Ils restèrent en surface, ne purent prendre racine et durent bien souvent partir en quête d’un autre ailleurs, toujours dans l’espoir d’y trouver ce qu’ils recherchaient lors de leur départ d’Irlande. La grande majorité fut obligée de perpétuer cet état de non-liberté temporaire afin de survivre, et seuls les plus chanceux parvinrent à réaliser leur rêve de propriété terrienne et ainsi à se hisser dans les classes supérieures de la société coloniale.
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Notes
1 Nicholas Canny, «The Ideology of English Colonization: From Ireland to America», The William and Mary Quarterly, 3ème Ser., 30.4 (1973), p. 575-598.
2 Voir le recueil de ballades irlandaises de Turlough Faolain, Blood on the Harp, Irish Rebel History in Ballad, New York, The Whitston Publishing Company, 1983.
3 Peter Wilson Coldham, The Complete Book of Emigrants, 1607-1660, Baltimore, Genealogical Publishing Company, 1987. Environ 50% des contrats ne spécifiaient pas l’origine de l’engagé.
4 Cecil Headlam, Calendar of State Papers Colonial Series, America and the West Indies, 1704-05, Londres, H.M. Stationery Office, 1916, p. 198.
5 George Alsop, A Character of the Province of Mary-Land [Londres, 1666], in Clayton Colman Hall (éd.), Narratives of Early Maryland, 1633-1684, New York, Charles Scribner’s Sons, 1910, p. 343-44.
6 John Hammond, Leah and Rachel, or, The Two Fruitful Sisters Virginia and Mary-land: Their Present Condition, Impartially Stated and Related [Londres, 1666], in Clayton Colman Hall (éd.), Narratives of Early Maryland, 1633-1684, New York, Charles Scribner’s Sons, 1910, p. 292-93.
7 Correspondance entre Thomas Anthony and Mathew Cradock, High Court of Admiralty Miscellany, Dossier H.C.A. 30/636, cité dans Abbot Emerson Smith, Colonists in Bondage; white servitude and convict labor in America, 1607-1776, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1947 p. 63-66.
8 Abbot Emerson Smith, Colonists in Bondage; white servitude and convict labor in America, 1607-1776, Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1947, p. 63.
9 David Galenson, White Servitude in Colonial America, An economic analysis, Cambridge, Cambridge University Press, 1981, p. 102-113.
10 Dans The Poor Unhappy Transported Felon’s Sorrowful Account of His Fourteen Years Transportation, at Virginia, in America, York, C. Croshaw Coppergate, 1800, p. 4.
11 . Gottlieb Mittelberger, Journey to Pennsylvania in the Year 1750 and Return to Germany in the Year 1754, Philadelphia, J. J. McVey, 1898, p. 19.
12 Alison Games, Migration and the Origins of the English Atlantic World, Harvard, Harvard University Press, 2001, p. 66-67.
13 James Revel, The Poor Unhappy Transported Felon’s Sorrowful Account of His Fourteen Years Transportation, at Virginia, in America, York, C. Croshaw Coppergate, 1800, p. 4.
14 Alison Games, Migration and the Origins of the English Atlantic World, Harvard, Harvard University Press, 2001; David Galenson, White Servitude in Colonial America, An economic analysis, Cambridge, Cambridge University Press, 1981; James Horn, Adapting to a New World, English Society in the Seventeenth-Century Chesapeake, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1994.
15 Howard Mackey et Marlene A. Groves, (éd.), Northampton County Deeds and Wills, 1655-1657, vol. 7, Camden, Picton Press Inc., 2002, p. 89.
16 Cecil Headlam, Calendar of State Papers Colonial Series, America and West Indies, 1706-1708, Londres, H.M. Stationery Office, 1916, p. 194.
17 William Waller Hening (éd.), Statutes at Large; Being a Collection of all the Laws of Virginia, vol. 2, Richmond, Samuel Pleasants, 1823, p. 348.
18 Ibidem,p. 404.
19 Voir la gravure et la description faites par Gerald of Wales dans les années 1180. Il décrit les Irlandais comme tel : « From an old and evil custom they always carry an axe in their hand as if it were a staff. In this way, if they have a feeling for any evil, they can the more quickly give it effect.» Giraldus Cambrensis, The History and Topography of Ireland, J. J. O’Meara (éd.), Dublin, Mountrath and Harmondsworth, 1982. Au XVe siècle, Strabo décrivit les Irlandais comme des cannibales dans Geography, trad. Horace Leonard Jones, 8 vol., William Heinemann, Londres, 1923, 4.5.4, 2 :259. Le siècle suivant, John Derrick se chargea également de représenter la barbarie des Irlandais dans Image of Ireland, Londres, 1581.
20 Nicolas Canny, « Dominant Minorities : English Settlers in Ireland and Virginia », dans A. C. Hepburn (éd.), Minorities in History, Londres, 1978, pp. 60-63, Kerby A. Miller, Emigrants and Exiles, Ireland and the Irish Exodus to North America, Oxford University Press, New York, 1985. Voir également Jean-Pierre Moreau, L’Angleterre des Tudors: 1485-1603, Paris, Ophrys, 2000.
21 Maryland Archives Online, vol. 15, p. 348.
22 Lois Green Carr et Russell R. Menard, «Immigration and Opportunity : The Freedman in Early Colonial Maryland», The Chesapeake in the Seventeenth Century : Essays on Anglo-American society, Thad W. Tate et David L. Ammerman (éd.), Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1979, p. 208.
23 Maryland Archives Online, vol. 23, p. 505.
24 Les principales sources utilisées pour cette étude sont les minutes de procès, les testaments et les inventaires après décès concernant les divers comtés du Maryland et de la Virginie entre 1630 et 1700.
25 . Lois Green Carr et Russell R. Menard, «Immigration and Opportunity : The Freedman in Early Colonial Maryland», The Chesapeake in the Seventeenth Century : Essays on Anglo-American society, Thad W. Tate et David L. Ammerman (éd.), Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 1979, p. 215.
26 Margaret McNeill Ayres, Charles City County Order Book, 1676-1679, Memphis, privately printed, 1968, p. 75.
27 Florence Stricker, Cormac McCarthy: les romans du Sud-Ouest, Paris, Ophrys, 2008, p. 18.